Catalogue OAI du consortium CAHIER

Marc Michel Rey

Lettre de Marc Michel Rey à Pierre Rousseau

1770
2017
Bahier-Porte, Christelle (édition)
Vial, Fabienne (édition)
Université Jean Monnet

Amsterdam, 25 décembre 1770 Mr Panckoucke, Monsieur, vient de me faire la proposition sur la quelle vous avés eu la bonté de me prevenir, de faire l’acquisition d’un sixieme à L’Encyclopedie moyennant 50.000 livres, je lui ay répondu que j’y acquiescois volontier, mais qu’il me falloit auparavant un tableau dans le quel se trouve cet ouvrage, de ce qu’il y a de fait, de ce qu’il reste a faire, etc. de l’ordre des payements pour l’execution du reste afin de n’etre pas arrêté en chemin, il y a tant d’objets, Monsieur, a envisager dans une pareille entreprise qu’il vous sera plus facile de vous les representer par vous meme que de vous les détailler. La vray cause de la presente, Monsieur, est qu’ayant eu occasion de connoître votre droiture, votre franchise et votre bon cœur a l’occasion de mon fils, je ne crois pas devoir vous faire, un mistere de ce que je pense a ce sujet, vous m’en dirés votre sentiment en suite ; je crois dailleur vous marquer par cette conduite que je ne suis pas indigne de votre [2] Je regarde Mr Panckoucke comme un honnêt homme ; mais il se trouve dans une pausition a pouvoir être culbutés, de pareilles entreprises a celles qu’il fait doivent de nécessité l’avoir mis dans des engagemens très considerables. Mr Cramer excellent homme, tout cœur, mais je ne lui crois pas beaucoup de facultés et il n’aime point le travail. J’ay connu les vieux Mesrs Detournes , je ne connois presque pas ceux d’aujourd’huy, je n’en ay rien a dire par conséquent. Voilà les intéressés, si malheureusement un vient a manquer a ses engagemens, sa portion retombe de nécessité sur les autres. Je propose à Mr Panckoucke une entrevue chez vous en fevrier ou mars prochain ; un de ces Mesrs de Geneve peut y venir, Mr Panckoucke avec les papiers nécessaires, je m’y rendrois et en peu de jours nous pouvons faire bien de la besongue arrêter nos faits afin de s’y conformer exactement. Quand j’aurai pris des engagements pour 50 mille livre il me [3] Quand une fois l’affaire sera en train, il n’est plus tems de réflechir mais de faire chemin. Si je prends des engagemens je suis très descidé a les tenir et je ne prendrai que ceux que je pourrai éfectuer. Je n’ay pas envie non plus de détruire en un coups, le travail de 30 années et de mettre une famille a la mandicité, toutes ces considerations m’obligent a prendre garde aux engagemens que je prendrai. Je crois l’entreprise très bonne, mais elle est si considerable qu’il faut y réflechir. On ne doit pas s’attendre a placer cette edition par les souscriptions, accause de l’edition d’Yverdon qui lui fait un grand tort et qui lui en auroit peu fait si les 3 premiers volumes avoient été publiés en leur tems. Voila, Monsieur, ce que j’ay cru devoir vous mander et sur quoi je vous prie de me dire sincerement ce que vous pensés. J’ay un beau fond, je n’ay point de dettes, je ne connois pas heureusement cette methode de payer des interêts , mais je ne suis pas en espèces, ce qui fait [4] Vous devés avoir receu, Monsieur, les volumes du Journal des Scavans jusques a Décembre 1770, en attendant la suite je vous ferai parvenir quelques nouveautés par la même voye. Ma femme et moi vous réiterons nos civilités, notre ainé après la fievre est allé voir la fille, s’en est mal trouvé et se trouve aujourd’huy assé bien de corps et d’esprit. J’espere que ces malheurs le feront perséverer dans les dispositions ou il est de s’occuper sérieusement cela va assé bien depuis quelque tems. J’ai l’honneur d’etre bien véritablement / Monsieur / votre très humble / et très obéissant serviteur Rey Le 25 Décembre 1770.